vendredi 27 janvier 2012

« The spiderman is having me for dinner tonight. »

   Je progresse dans un monde invisible ; ils m’attrapent, brusquement, je ne sais pas d’où ils sortent ; et qui sont-ils ? Ils ressemblent à des vers – des filins – de légers fils d’araignée qui s’enroulent autour de mes bras, mes jambes, ma bouche, ils me bâillonnent, c’est la fin ; je ne peux plus parler ; ma tension augmente avidement, mon cœur bat et bat encore, où est-il ? Ils m’enserrent, attaquent mes yeux maintenant, je ne vois plus, que ce brouillard visqueux et opaque qui se dépose sur mes paupières, je ne te vois plus, je te perds, et je suis déjà flou dans tes yeux ! Qui suis-je ? La question ne se pose plus au creux de la toile ; je ne suis plus de toute façon ; je ne suis plus rien ; plus personne ; une personne peut-être ; à peine. Non. Le chant de l’araignée s’élève, c’est une mélopée sifflée, soufflée du passé. Elle tire sa toile, en rythme, viens, mon joli, viens, susurre-t-elle, ce soir tu seras mon dîner…
   Je suis aveugle.
   L’araignée murmure une mélodie amoureuse à mon oreille. Elle me mangera tout à l’heure, pour l’instant elle me regarde ; elle a de grands yeux innocents chargés de haine, elle me sourit ; tu es mien, tu es mien, tu es pris… chantonne-t-elle… et je t’aime, je t’aime, regarde comme je t’aime…
   Je n’ose plus me débattre, à vrai dire, ma volonté a fui ; je me noie dans ses huit regards flamboyants, c’est un volcan d’émeraude que ces yeux, pierres précieuses en fusion qui jaillissent dans une étourdissante ébullition d’étincelles, elles me brûlent, elle est si agréable cette brûlure, oh ! je t’aime, j’ai envie de lui répondre, j’ai envie de la serrer contre moi, cette monstrueuse et venimeuse peluche qui s’apprête à me digérer en me murmurant une berceuse… je l’aime.
   Les toiles m’entourent, tout semble si vieux ici ; ou bien mon âme a vieilli entre-temps, et je ne retrouve plus rien de ce qui était avant, je ne suis plus nulle part, ma tortionnaire idolâtre me regarde et m’embrasse, je vois son venin verdâtre suinter des crocs qu’elle approche de ma bouche et… que fais-je ? Horreur, voilà que je me recule ; voilà que je la fuis ; pourquoi voudrais-je te quitter, mon amour ? Je reviens, je reviens, regarde-moi ! je ne suis jamais parti ! Je suis toujours là près de toi, et tu me brûleras tant que tu voudras, je suis à tes pieds ma belle, avachi comme un prince dans son or dont il n’a que faire.

   Pourquoi est-ce que tu me regardes comme ça ?

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